LE DAUPHINÉ LIBÉRÉ, 17.02.2010

Alain Prost: « Deuxième, c'est pas mal avec une nouvelle auto »


Recueilli par Olivier GUIGUES

Deux semaines après la fin du Trophée Andros 2010, qu’il a terminé à la deuxième place, Alain Prost est revenu à Val Thorens, sur le circuit qui porte d’ailleurs son nom, pour une dernière séance de travail dédiée à la préparation de la Dacia Duster pour 2011.Au passage, il a fait le point sur cet hiver en bleu…
Il a manqué beaucoup de temps de préparation. Je ne pense pas que ce soit si simple que ça de gagner la première année... Et de toutes façons, compte tenu du timing spécifique de l'Andros, ça ne sert pas à grand chose de rouler avant, et puis le projet est vraiment parti fin septembre. Par exemple, on a eu la première carto moteur et on a roulé sur l'asphalte une semaine avant le début. C'est trop court. On pensait faire des choses entre Noël et le jour de l'an mais c'est une période un peu compliquée.

L'entraînement sur la terre, ça sert?
Je l'ai fait à une époque, je n'avais aucune expérience. Ça donne toujours du feeling mais plus par rapport à la voiture même: tester le pédalier, se sentir bien dans la voiture, le siège, trouver l’osmose avec la voiture. Le terrain ça n’a rien à voir. Et quand on l’a fait, on a abimé la voiture, on a mis 15 jours à la nettoyer! Mais même sur l’asphalte on arrive à voir des choses, au niveau du développement moteur, progressivité. Pour voir un truc spécifique, c’est possible. Mais ça ne remplace pas la glace.

Car la glace est par essence une surface éphémère…
C’est la différence. Ils voulaient refaire de la glace hier, moi je préfère avoir une piste comme ça, avec un peu de goudron et de pierres mais qui bouge pas mal. C’est là qu’on est les moins bien. Parce qu’on sait à peu près ce qui ne va pas sur la voiture et pour identifier clairement on a besoin de ce genre de piste. Ce n’est pas du vrai développement, c’est plus de la compréhension, des choses qu’on enregistre pour 2011.

Ça veut dire que vous repartez l’année prochaine?
Normalement, on fait tout comme… Tant que ce n’est pas fait… Mais on fait tout pour que ça reparte.

Votre rival, Jean-Philippe Dayraut, comment le jugez vous? Sa force c’est l’auto, le pilotage, il a quelque chose de particulier?
En pilotage, de toutes façons c’est incontestablement depuis très longtemps le plus rapide ou un des plus rapides. Depuis l’année dernière il y a eu une évolution assez incroyable de ses performances en même temps que la voiture. Si on se fie à ce qu’a fait Olivier avec la 2e voiture et quand il a pris la sienne, qu’il fait une fois premier une fois deuxième… il y a apparemment un gros écart moteur.

Quand on vous regarde l’un et l’autre, on voit de grosses différences de trajectoire
C’est très possible, sur la glace il y a plusieurs manières d’aller vite. Après, il faut que ce soit complètement en adéquation avec ce que le pilote aime et aussi par rapport au moteur, rapport de boîte… La trajectoire c’est une chose; il ya de gros écarts entre ce que faisait Jean-Philippe cette année et ce que je faisais. Je considère que j’étais limité, je ne pouvais pas faire autrement. Je n’ai même jamais conduit comme cette année où j’ai pris quatre, cinq fois le mur de neige d’une manière presque inexpliquée. La voiture n’est pas si saine, mais on le sait, il faut qu’on travaille.

Vous recherchez une voiture facile?
D’abord l’efficacité. Après, je me méfie quand un dit «voiture facile». C’est souvent une voiture qui n’est pas rapide. Par contre une auto qui vous donne un bon feed-back, que vous comprenez bien, même si elle est compliquée à conduire, c’est essentielle. C’est ce que je n’ai pas aujourd’hui avec la Dacia mais bon, on identifie, il n’y a pas de langue de bois entre nous. On va travailler.

Quelle est, quelle a été votre implication dans la conception, la fabrication de cette voiture?
Les exigences, c’est "voilà ce que j’aime, voilà ce que j’aime pas, voilà ce que j’aimerais avoir en moteur". C’était la force de la Toyota, un moteur très souple, ce que j’avais voulu, qui me donnait beaucoup de performance. Là on a fait quelque chose avec Richard Tur, la voiture a un potentiel qui n’est pas remise en cause, si ce n’est qu’il y a un ou deux trucs qui ne fonctionnent pas et nous limitent en performance.

Finalement la deuxième place est plutôt satisfaisante?
C’est pas mal avec une nouvelle auto. En plus on a été très réguliers, à part la dernière course où on a pas été dans le coup alors que j’étais très confiant. Par contre contrairement à d’habitude, sur des manches où je peux m’arracher vraiment pour aller chercher le chrono, on est toujours resté sur un niveau où c’était impossible. Trop de fautes, trop difficile avec le moteur, la direction… ça fait beaucoup de choses. Ça n’a l’air de rien mais…

Et la part du pilote là-dedans?
On est en premier tributaires de la voiture. Là, je pense que c’était impossible de gagner le Trophée.

Vous pensez avoir engrangé assez d’expérience pour tout connaître de la discipline?
On apprend toujours. Dayraut fait ça depuis combien de temps? 15 ans? Il a franchi un cap énorme l’an dernier seulement. Il y a une part de psychologie, de confiance, très importante. C’est ce qui est sympa, l’impression qu’on va toujours pouvoir faire mieux, différemment. Mais toujours avec la voiture. Jamais seul.

Quand on vous voit dans les stands à côté de la Lola de Nicolas, votre fils… ça ne vous démange pas?
Pas du tout. Je suis devenu complètement claustro et je ne suis pas sûr que je pourrait rester longtemps dans une telle auto. Déjà dans la Dacia, il faut que je soit sûr que la portière fonctionne bien, que je puisse sortir!

C’est un peu la mode mais est-ce que ce genre de discipline n’inciterait pas à faire du rallye?
J’ai toujours été fan, même si je n’en ai fait qu’un dans ma vie, mais c’est un problème de temps et d’implication. Et aujourd’hui c’est un peu tard, et faire un rallye, choisir le bon qui ne soit pas trop dangereux, se préparer, ça fait beaucoup. Mais j’aimerais bien. Pas sur l’asphalte, c’est trop dangereux dans le sens où il faut avoir un maximum d’expérience. Le pistard qui arrive sur un rallye, n’a pas la conduite qu’il faut. On est toujours en risque.

Un type "Arctic Rally" ne vous tenterait pas?
Oui, il y a un problème de calendrier avec l’Andros, mais ça me tenterait bien. J’ai essayé en Laponie, la première année avec la T3 divers pneus typés rallye… J’ai pris un "pied" incroyable. Sur la glace, on conduit comme en circuit. Des sensations incroyables.



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