SPORT365.FR, 11.09.2013

Alain Prost: "Räikkönen - Alonso, c'est risqué"


Invité téléphonique de L'access 365 ce mercredi sur Sport365 TV, Alain Prost a répondu aux questions d'Alexandre Delpérier et David Aiello. Le sujet : l'association Alonso - Räikkönen puisque le Finlandais rejoindra Ferrari la saison prochaine. Un pari « risqué » selon l'ancien quadruple champion du monde.

Kimi Räikkönen revient chez Ferrari en 2014. Une écurie qu’il connaît bien puisqu’il y a été champion en 2007. Lotus a visiblement mal apprécié son départ. Que pensez-vous du risque d’associer Alonso et Räikkonen?
Il n’y a aucun doute, c’est risqué et pour plusieurs raisons. S’ils ont signé Räikkönen c’est parce qu’il y a un peu de tension entre Ferrari et Alonso. Tout le monde l’a vu, tout le monde l’a su: il y a eu des approches d’Alonso et de son manager vers d’autres écuries. Donc déjà, cela crée un climat de tension. Puis le fait que Räikkönen arrive fait qu’il ne pourra pas être vraiment numéro 1. Ils seront deux numéros 1 à égalité dès le début du championnat. L’autre raison, c’est qu’on manque un peu d’ingéniosité chez Ferrari. Ce n’est plus l’époque de Jean Todt, de Ross Brawn et d’un génie dont on parle peu: Rory Byrne. C’est quelqu’un de peu connu mais il était le designer des voitures gagnantes chez Ferrari. Aujourd’hui, il est en préretraite et cela se sent. Mais il n’y a pas non plus la poigne de quelqu’un comme Todt ou Brawn pour diriger deux pilotes avec beaucoup d’expérience, déjà champions du monde. Il y a un problème d’ego, il va falloir tenir ces deux pilotes. Donc c’est quand même très risqué. Mais vous savez en F1, il y a aussi des choses qui se passent très bien avec des rivalités. J’ai connu une année formidable avec Ayrton Senna en 1988 malgré une rivalité un peu exacerbée. Mais on s’entendait très bien et on s’est surpassé. Mais dans le cas de Ferrari, je crois que ce sera un peu compliqué.

On peut prendre les meilleurs ou quelques uns des meilleurs pilotes, s’ils n’ont pas une bonne voiture cela ne sert à rien, non?
Il y a une évolution dans la F1 depuis de très longues années. Par exemple, je n’ai jamais été pilote numéro 1 dans une écurie. En tout cas, contractuellement, cela ne m’est jamais arrivé. Mais c’est vrai que dans toutes les équipes de pointe, avoir un vrai numéro 1 et un vrai numéro 2, c’est une force supplémentaire. Au moins vous concentrez toute votre énergie sur un pilote, on ne prend pas bêtement des points par rapport à l’autre. Une écurie comme Ferrari, elle a été très performante aussi grâce ou à cause de cela.

Donc vous nous dites que c’est mieux d’avoir un numéro 1 et un numéro 2?
C’est sûr que sur le plan sportif, c’est mieux pour les résultats, pour l’efficacité. Je suis comme tout le monde, je suis redevenu un fan. Je dis que Räikkönen chez Ferrari, c’est risqué. Par contre, si je suis fan, je trouve cela génial aussi d’avoir deux tels pilotes dans la même équipe et en plus chez Ferrari. Mais cela ne va pas être simple. Si on mise sur l’efficacité, on prend un numéro 1 et un numéro 2. N’oublions pas les médias italiens, c’est une pression derrière. Il est évident qu’à un moment ou à un autre, il y aura un petit accroc.

Reprendre un pilote qu’on a viré il y a cinq ans contre un chèque de 35 millions d’euros, ne trouvez-vous pas que cela fasse désordre, surtout que ce sont toujours les mêmes patrons?
Exactement. Mais je trouve que cela fait aussi partie de la beauté de la Formule 1. C’est un monde fermé, restreint. On a tous eu des problèmes à un moment ou à un autre. Alors on met le poing dans la poche, on oublie ce qu’il s’est passé et on essaie de faire le meilleur travail possible. Je ne pense pas qu’il y ait des conséquences par rapport à ce qu’il s’est passé entre Ferrari et Räikkönen.

Mettre dans les pattes de Fernando Alonso un pilote déjà champion du monde, surtout chez Ferrari, ce qui n’est pas le cas de l’Espagnol qui a été sacré avec Renault, qualifieriez-vous cela de vicieux, tordu ou logique?
Logique, oui et non. Mais d’une certaine manière, peut-être les trois parce que cela vient surtout du fait que Fernando a manqué un tout petit peu de loyauté envers Ferrari ces dernières semaines. C’est un peu une conséquence de cela. Après, je ne veux pas juger. Si on regarde bien, la Scuderia n’avait pas tellement d’autres solutions. Ressigner Massa n’aurait pas été une bonne idée. C’était soit prendre un jeune comme Nico Hülkenberg qui était sur la liste et qui aurait été un très bon étalon pour Alonso, soit Räikkönen qui est une personnalité totalement différente de tous les autres pilotes depuis très longtemps. C’est peut-être un des seuls à pouvoir s’accommoder à Alonso, qui va accepter d’être numéro 2 de temps en temps, qui ne va pas avoir les mêmes soucis polémiques ou politiques dans une équipe. Donc ce n’est peut-être pas un si mauvais choix.

Qui de Räikkönen ou Alonso vous paraît aujourd’hui être le plus performant?
Sur l’ensemble de la saison, je serais tenté de dire Alonso. Il a toujours été un pilote endurant. C’est-à-dire qu’il utilise au maximum le matériel dont il dispose. Mais aujourd’hui, cela va vraiment dépendre de la psychologie de chacun pendant l’hiver et en début de saison. N’oublions pas non plus qu’il va y avoir de nouveaux règlements. Donc est-ce que Räikkönen va beaucoup s’impliquer dans le travail de l’équipe? Techniquement, cela va être très compliqué car ce n’est pas son fort. Sur le papier, je dirais qu’Alonso est encore devant Räikkönen aujourd’hui.

Rédigé par Rédaction Sport365



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