SPORT365.FR, 08.09.2007

Alain Prost : « Ça me rappelle ce que j’ai vécu en 1986 »

Interview: Jean-Moise DUBOURG

A l’approche du Grand Prix d'Italie et comme avant chaque course, Alain Prost nous livre son analyse. Le quadruple champion du monde explique que la situation actuelle du Championnat évoque sa propre situation il y a 21 ans.

Avec son doublé en Turquie, Ferrari s’est relancé dans la course aux titres mondiaux (constructeurs et pilotes). Pensez-vous que la Scuderia peut toujours inquiéter McLaren-Mercedes?
Ils se relancent, oui. S’ils peuvent inquiéter McLaren? Ça, s’est sûr. Ils avaient l’air assez confiant avant le Grand Prix de Turquie. Pour deux raisons : d’abord, parce que leur voiture est typée pour les circuits rapides avec un empattement assez long. Ensuite, on l’a vu dans les déclarations des dirigeants de Ferrari avant la course, ils ont pour objectif simple de gagner tous les Grands Prix. Ils ont progressé au niveau du développement de la voiture. Vont-ils confirmer à Monza? C’est à voir, mais pour l’instant, ils sont redevenus un peu plus dangereux pour McLaren.

Y’a-t-il un pilote n°1 chez Ferrari?
Pour le moment, il n’y a pas de pilote n°1 attitré. On l’a vu en Turquie puisque Massa et Räikkönen ont fait des courses quasi similaires. Ils étaient très proches l’un de l’autre et il n’y a pas eu de consignes. C’est d’ailleurs assez exceptionnel depuis quelques années en F1 - où il y a toujours eu des pilotes n°1 dans les équipes - que, concernant les deux écuries et les quatre pilotes qui se disputent le titre, il n’y ait pas encore d’ordre établi à cinq courses de la fin de la saison. Ce qui va d’ailleurs être un vrai problème psychologique et mental en interne, dans ces écuries… A un moment, il faudra bien définir qui est le n°1. Peut-être au dernier moment. Tout le monde l’attend. C’est vrai aussi que cette décision est difficile à prendre actuellement car les pilotes sont quasiment à égalité. Cela dépend de ce que vont nous réserver les prochaines courses.

Ferrari et McLaren peuvent-elles, au contraire, ne pas choisir de n°1 jusqu’à la fin de la saison?
C’est tout à fait possible si les quatre pilotes de pointe continuent de se partager les points comme c’est le cas depuis le début de saison. Il n’y a que dix, quinze points d’écart entre les pilotes McLaren et les pilotes Ferrari. Mais que va-t-il se passer si un seul pilote marque des points et que le classement général se resserre un peu plus? Pour le moment, c’est surtout McLaren qui prend des risques parce que l’écurie britannique, globalement, a une meilleure voiture mais aucun des deux pilotes n’a fait un trou suffisant au général. Ça me rappelle beaucoup ce que j’ai vécu en 1986 où j’avais une voiture inférieure. Piquet et Mansell se bagarraient et au dernier Grand Prix, j’ai pu gagner le Championnat parce qu’ils se sont partagés les points tout au long de l’année.

Quatre pilotes en seize points, il reste cinq courses. Comment voyez-vous la fin de saison?
On aborde la dernière ligne droite. Sur ces cinq dernières courses, je ne pense pas qu’on reverra le même scénario que depuis le début de saison. Il va automatiquement se passer des choses. Les pilotes vont devoir prendre plus de risques. On arrive dans la période où c’est un peu du quitte ou double. Par exemple, les pilotes Ferrari, qui ont quinze points de retard, ne peuvent pas se permettre de ne pas terminer un Grand Prix. Le Championnat serait sans doute perdu. C’est là où c’est intéressant: si un pilote Ferrari gagne et l’autre abandonne, on pourrait peut-être nommer un n°1.

La situation est-elle la même chez McLaren?
Je ne suis pas certain. D’abord parce qu’il y a toujours eu chez McLaren une culture qui favorise l’émergence de deux pilotes n°1 à égalité. Ils n’aiment pas trop – en tout cas ouvertement - mettre un pilote plus en avant que l’autre. L’autre raison, c’est que, comme ils sont plus proches l’un de l’autre, même s’il y a une victoire, par exemple d’Alonso, ça ne ferait que quelques points d’écart dans l’autre sens. Ce ne serait donc pas suffisant pour nommer un n°1.

Quel est votre pronostic pour Monza?
Normalement, c’est avantage Ferrari car c’est leur jardin et ils n’auront pas envie de perdre devant les tifosi, comme chaque année. Par contre, je mets vraiment McLaren et Ferrari à égalité. McLaren a réussi de très bons essais et Ferrari a caché son jeu. Le côté psychologique sera important et pour nous, spectateurs, c’est très intéressant.



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